L'autobus - Eugenia Almeida (2005)
Il existe des livres, comme celui-ci, qui n'ont l'air de
rien : une centaine de pages, une couverture quelconque, un titre anodin... Mais
c'est souvent quand on ne s'y attend pas que l'on se retrouve estomaqué. Et
justement L'autobus
est l'un de ces petits romans dont l'aspect inoffensif dissimule en réalité une
force tragique et une puissance critique insoupçonnées.
L'intrigue paraît banale : dans une petite ville perdue
en Argentine, l'autobus passe tous les soirs, mais depuis trois soirs, il
ne s'arrête plus. Et cela fait trois soirs que l'avocat Ponce accompagne sa
sœur pour prendre cet autobus qui passe devant eux sans s'arrêter. Trois soirs
qu'un couple attend lui aussi cet autobus qui ne s'arrête pas. Alors que Ponce
ramène sa sœur chez lui dans l'attente du prochain bus, le couple, excédé,
décide de partir à pieds le long de la voie ferrée. Car le train non plus ne
passe plus, la barrière du passage à niveau est baissée et un wagon posé sur la
voie empêche toute circulation. Le village s'interroge, le soupçon et la
confusion s'installent. La radio parle d'une jeune fille en fuite, d'un couple
de subversifs, d'exercices militaires, d'une fusillade à la nuit tombée... Et
l'autobus s'arrête de nouveau alors que personne ne l'attend plus.
Une écriture minimaliste, des dialogues elliptiques, un
récit théâtralisé, un nombre réduit de personnages et un périmètre d'action
très restreint : ce roman étrange se caractérise par sa sobriété et son
détachement sous lesquelles couve une atmosphère de terreur larvée. Et même si
ce roman reste un peu "en deçà", il révèle sous son apparence
anecdotique une vraie force critique en illustrant la contamination rampante
des actes et des esprits par la perversité du pouvoir dictatorial.
BlueGrey
Publicado el 04/09/2007
http://descaillouxpleinleventre.blogspirit.com/archive/2007/09/04/l-autobus-eugenia-almeida-2005.html
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