Interview d’auteur : rencontre avec Eugenia Almeida
Eugenia Almeida est une auteure argentine.
Journaliste pour la télévision, la radio mais aussi pour la presse écrite, elle a parcouru, guitare à la main, la France et l’Italie pendant près d’un an.
Ce n’est donc qu’en 2004 qu’elle publie son premier roman ‘El Colectivo’.
En France, elle se fait connaître grâce à son livre « L’Autobus » (2007, éditions Métailié, traduit par René Solis) – roman qui lui a permis d’obtenir le prix Littérature ainsi que le prix Las Dos Orillas.
Cette année, elle revient sur le devant de la scène avec « L’échange » (éditions Métailié, traduit par François Gaudry) : « Un drame étouffant, intensément mené. » (Laura Daniel de Sang Froid), un roman glaçant, construit avec intelligence.
Les chapitres sont succincts, les dialogues sans fioritures.
Une chose est sûre, un sentiment d’urgence permanente se dégage de la prose concise de l’auteur.
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Bonjour. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous parler de votre dernier roman « L’Echange » ?
Je suis une auteure argentine. Je suis née dans la ville de Córdoba, en 1972. Journaliste pour la presse écrite et une radio publique, j’enseigne également la littérature à l’université.
Narratrice avant tout, j’ai également publié des livres de poésie.
« L’échange » est mon quatrième livre et mon troisième roman. J’ai l’immense privilège d’être publiée aux éditions Métailié, une maison d’édition qui m’accompagne depuis mon tout premier livre.
Comment est né votre roman ? Comment le définiriez-vous ?
« L’échange » est né comme tous mes autres écrits : une image s’installe dans ma tête et soulève des questions. Dans ce cas précis, l’image était celle d’une jeune mère, morte, étendue dans une rue, une arme à la main, un trou dans la poitrine. Des curieux l’entourent. Ces gens ne s’arrêtent que lorsqu’un malheur frappe.
Ce roman est très difficile à définir. Je joue un peu à mettre en tension une idée rigide des sexes.
Guyot, le personnage principal, me rappelle les anti-héros de l’oeuvre de Graham Green. Ceux qui ne souhaitent pas s’impliquer et cherchent à éviter les problèmes. Pour autant, Guyot affirme que « La pire tentation, c’est de vouloir comprendre. » Pouvez-vous nous en dire plus sur ce point ?
Il ne s’agit pas de chercher une vérité « journalistique », de chercher quelque chose à publier dans un journal. Au contraire, il s’agit d’essayer de comprendre un geste personnel ; l’un des gestes les plus privés et les plus difficiles à comprendre : le suicide.
Par ailleurs, le suicide comme présenté en début de roman n’est pas un suicide ordinaire. Il est en effet atypique, pour une personne qui s’est suicidée, d’avoir un trou dans la poitrine et que cela ce soit passé dans un lieu public.
La phrase « la pire tentation est d’essayer de comprendre » fait référence aux obstacles qui pourraient entraver la recherche. Il faut parfois accepter qu’on ne puisse pas tout comprendre.
Vous avez été souvent perçue comme une auteure de policier. Pour autant, en quoi est-il possible de dire que votre roman « L’Echange » est avant tout un roman politique très noir ?
Seuls les lecteurs peuvent répondre à cette question. Et je présume que chaque lecteur a un regard différent. Je n’aime pas beaucoup les catégories. Ce que j’aime c’est raconter des histoires. Je crois que toutes les histoires que je conte (y compris celles qui s’apparentent à des poèmes) ont un versant politique. Je crois que tout ce que nous faisons dans le monde a un côté politique ; politique dans le sens où chaque geste a un effet sur le monde, et qu’il se partage avec d’autres personnes.
Mais ceci n’est que mon avis personnel. Chaque lecteur aura son propre regard sur ce roman. C’est ce que j’aime dans la littérature : l’infinité de sens et de significations qu’elle permet.
De nos jours, les romans noirs renvoient au sang, au gore. A l’inverse, vous nous proposez une autre esthétique. Pouvez-vous nous en dire plus ?
La réponse est simple. Je n’aime pas le gore. J’adhère davantage à la prémisse de la tragédie grecque : si quelque chose d’horrible se produit, cela doit se produire en dehors de la scène. Le spectateur (le lecteur) n’a pas besoin qu’on lui souligne l’horreur. Il peut la comprendre simplement en la visualisant.
Selon vous, quelles sont les raisons du succès du roman noir de nos jours ?
Peut-être parce que j’aborde certaines thématiques (politiques, sociales) sous un format actuellement populaire. Peut-être parce que je parle de ce qui nous arrive d’un point de vue social. Peut-être parce que nous aimons les histoires de monstres. Et lorsque les monstres de ces histoires habitent également le monde réel, la littérature nous aide à comprendre d’une autre manière.
Si je ne m’abuse, vous avez écrit votre livre dans le nord de la France, dans une résidence du Mont Noir (celle de Marguerite Yourcenar). Cela a-t-il modifié votre processus d’écriture ? Avez-vous apprécié vivre en France ?
En réalité, le processus d’écriture ne se répète jamais. Il est toujours nouveau et différent. Pour ce qui est de mon séjour dans la résidence de Marguerite Yourcenar, ce fut une expérience extraordinaire. Deux mois entièrement dédiés à l’écriture, dans un lieu idyllique, sans aucune autre préoccupation. Ce fut crucial pour l’écriture.
« L’échange » n’existerait pas si je n’avais pas résidé au Mont noir. Vous auriez entre les mains un tout autre livre.
Je témoigne d’ailleurs toute ma gratitude au personnel de la résidence.
Jorge Luis Borges disait « nous sommes ce que nous lisons ». Que lisez-vous en ce moment ?
Je lis beaucoup. Mon travail consiste à rédiger des critiques littéraires. Mes lectures comprennent donc les dernières nouveautés et des lectures plus personnelles.
S’agissant de ces dernières, je lis surtout des romans noirs, des romans policiers. C’est un genre que j’apprécie beaucoup.
Je lis de la poésie. J’aime également lire des livres non littéraires. Je m’intéresse à la physique, à la philosophie et à la criminologie.
Du côté de mes compatriotes, j’apprécie les romans de Samanta Schweblin, Eduardo Berti, Pablo de Santis, Selva Almada, Perla Suez, et de bien d’autres encore.
La scène littéraire argentine est pleine de talents.
L’une de mes dernières trouvailles est la chilienne Alejandra Costamagna. Son livre « Ultimos fuegos » m’a ébloui !
Pour conclure, travaillez-vous sur un prochain roman ?
J’ai toujours quelque chose sur le feu. Je suis actuellement à la moitié d’un roman. Je ne peux pas en dire plus pour le moment.
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Je remercie très chaleureusement Eugenia Almeida pour sa gentillesse et disponibilité.
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Háblame un poco de usted y del último libro que has publicado « La tensión del umbral »
Soy una escritora argentina, nacida en la ciudad de Córdoba, en 1972. Trabajo como periodista cultural (en uno de los diarios de mi ciudad y en una radio pública), dicto talleres de lectura y doy clases a nivel universitario. Me siento fundamentalmente narradora aunque también he publicado poesía.
“La tensión del umbral”, que en francés se llama “L’ Échange”, es mi cuarto libro y mi tercera novela. Tengo el enorme privilegio de publicar en Editions Métailié, una editorial que me ha acompañado desde mi primer libro.
¿Cómo nació tu novela? Y ¿Cómo definiría la novela?
“L’ Échange” nació del mismo modo que todo lo que escribo: una imagen se instala en mi cabeza y me plantea preguntas. En este caso, la imagen que tenía siempre presente era la de una mujer joven, muerta, tirada en una calle, con un arma en la mano, un agujero en el pecho y rodeada de curiosos, esa gente que siempre se detiene a mirar cuando sucede una desgracia.
No es tan sencillo definir esta novela. Juega un poco a poner en tensión cierta idea rígida de los géneros.
El periodista, Guyot, me recordó los antihéroes de Graham Greene. No quieren involucrarse demasiado ni buscarse problemas. Sin embargo, el protagonista dice : « la peor tentación es tratar de entender ». Me gustaría que te explayaras sobre esta idea.
Guyot quiere involucrarse. No se trata de buscar una verdad “periodística”, algo que pueda publicar en el diario. Se trata más bien de todo lo contrario: tratar de comprender un gesto privado, uno de los gestos más privados y más difíciles de comprender que puede tener un ser humano: el suicidio.
Por otra parte, el suicidio con el que empieza esta novela no es un suicidio típico, hay dos características no tan habituales: un disparo en el pecho, un lugar público.
Esa frase « la peor tentación es tratar de entender » hace referencia a los obstáculos que puede traer la búsqueda. A veces uno comprende justamente en el momento en que acepta la posibilidad de no comprender.
Muchas veces se te ha catalogado como escritora de policial, o género negro. ¿Pero, en qué medida se pueda decir que « La tensión del umbral » es un policial político y no sólo un policial?
Esa es una pregunta que solo pueden contestar los lectores. Y supongo que cada lector tendrá una mirada diferente. No creo mucho en las categorías cerradas. Me gusta contar historias. Creo que todas las historias que cuento (incluso las que pueden aparecer en un poema) tiene un costado político. Creo que todo lo que hacemos en el mundo tiene un costado político, político en el sentido de que cada gesto tiene un efecto sobre un mundo que es compartido con otras personas.
Pero esto que digo es una mirada personal. Los lectores podrán leer esta novela del modo que sea. En cada uno de ellos tendrá una resonancia diferente. Eso es lo que me gusta de la literatura: es un hermoso artefacto de producir infinitos sentidos.
En un tiempo en que las novelas negras están cargadas de sangre, bordeando lo gore, proponés otra estética. Me gustaría hablar de eso.
La respuesta es sencilla. No me gusta lo gore. Adhiero más a la vieja premisa de la tragedia en la Grecia clásica : si algo horrible ocurre, debe ocurrir fuera de escena. El espectador (el lector) no necesita que le subrayen el horror. Puede comprenderlo con solo vislumbrarlo.
¿Por qué creés que el género negro está siendo consumido con tanta avidez en todo el mundo?
Es difícil de responder. Quizás porque aborda ciertas temáticas (políticas, sociales) con un formato popular. Quizás porque habla de lo que nos pasa socialmente. Quizás porque siempre hemos disfrutado los cuentos de monstruos. Y cuando los monstruos de nuestros cuentos son los que habitan el mundo real, la literatura nos ayuda también a comprender de otro modo.
Si no me equivoco, usted ha escrito esta novela en la residencia de mont Noir, en el norte de Francia. ¿Cómo fue la experiencia de escribir en otro país? ¿Se modificó el proceso de escritura?
La verdad es que el proceso de escritura nunca se repite. Siempre hay algo nuevo y diferente. En el caso de mi estadía en la residencia Marguerite Yourcenar, fue una experiencia extraordinaria. Dos meses absolutamente dedicados a la escritura, en un lugar idílico, sin ninguna preocupación. Fue realmente nodal en la escritura. L’Échange no existiría si no hubiera estado en Mont noir. Sería otro libro, no ese. Siento un enorme agradecimiento con todo el equipo de la residencia.
Jorge Luis Borges dijo: « somos lo que somos por lo que leemos ». Me gustaría saber lo que lee actualmente.
Leo muchísimo. Trabajando haciendo reseñas de libros así que mis lecturas mezclan mis búsquedas personales con las novedades que se van publicando en mi país. Siempre leí algo de novela negra, de policiales, es un género que disfruto mucho. También leo poesía. Y me gusta leer libros no literarios. Me interesa mucho la física, la filosofía y la criminología.
Entre mis compatriotas, siempre disfruto leer a Samanta Schweblin, Eduardo Berti, Pablo de Santis, Selva Almada, Perla Suez, entre muchos otros. Es un momento muy rico en la literatura argentina. Uno de mis últimos descubrimientos es la chilena Alejandra Costamagna. Su libro “Últimos fuegos” me deslumbró.
Para finalizar ¿Está trabajando en algún nuevo libro?
Siempre estoy con algo entre manos. Diría que estoy a mitad de una novela. Ojala pronto podamos volver a encontrarnos para charlar sobre este manuscrito cuando finalmente se transforme en libro.
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Propos traduits et recueillis par Emilie Bonnet
http://blog.collibris-app.com/interview-dauteur-rencontre-avec-eugenia-almeida/
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