Il est impossible de répéter ce que l’on n’a pas encore avalé
Un homme sur un banc. Sofia, jeune
serveuse de bar brise l’indifférence. Mais être assis sur un banc, ne pas
parler est manifestement un trouble à l’ordre public.
Au commissariat, c’est au tour de Frias
de rompre le mépris. Décidément la présence de cet homme trouble le paysage,
déplace des interrogations, ouvre des portes cadenassées par le temps. En
petits chapitres, Eugenia Almeida nous fait ressentir la différence, la
froideur, « Un de ces baisers creux que l’on envoie en l’air, le faux
jumeau d’un vrai salut ».
Des histoires plus anciennes, une
amputation, une femme enfermée et une gamine malmenée…
Elena, nommée dans cet hôpital,
s’écarte de l’attente, se confronte au conte, au rejet de la
« folie », de la différence. Les pistes se brouillent, les troubles
s’exposent, les refus aussi. Peu à peu, les pointillés deviennent des chemins,
des sensations, des relations. Une main posée, un sourire, un étonnement, un
monde plus ouvert à la chaleur, aux rencontres. Norma, Horacio, Mabel…
Les brides d’histoires se rencontrent,
avec en toile de fond, cette pièce, celle du fond, celle des souvenirs, dont la
porte s’ouvre, ou ne s’ouvre pas. Insensiblement les phrases de l’auteure
ouvrent des communs, des croisées aux personnages, nous infuse le goût du maté.
Un livre offert comme par « Quelqu’un
qui, avant de partir, vous habille ».
Eugenia Almeida : La pièce du fond
Traduit
de l’espagnol (Argentine) par François Gaudry
Métailié,
Paris 2010, 200 pages, 18 euros
Didier Epsztajn
15/06/2013
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