martes, 3 de septiembre de 2013

Elisabeth Jobin - Le Temps: comentario sobre la versión francesa de "La pieza del fondo"


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les mélancoliques et les rêveurs d’Eugenia Almeida

 

 Par Elisabeth Jobin

L’Autobus, premier roman de l’auteure argentine Eugenia Almeida, s’était posé, il y a trois ans, comme une plume sur les rayons de la bibliothèque contemporaine sud-américaine. C’était l’histoire d’un village poussiéreux que seul un autobus reliait au monde. Y vivaient des personnages fermés à toute nouveauté, à peine imbibés de rumeurs, nourris à quelques ragots ramassés à l’angle de deux rues. Déjà, dans l’écriture, on observait cette attention particulière donnée aux mots et l’absence remarquable de tout adjectif superflu. Le passé des personnages se déclinait en une série de détails fleuris, donnant au lecteur l’impression de lire ce court roman les yeux éblouis par le soleil blanc d’Argentine.

La Pièce du fond, deuxième roman de l’auteure, évoque lui aussi nombre d’images. Celle, tout d’abord, d’un cordon sur lequel s’enfilent, comme des perles, les personnages du livre. Ces derniers se succèdent, se ressemblent légèrement en ce qu’ils sont tous habités par la même mélancolie. «On s’habitue. On trouve son rythme. Un temps. Mais un beau jour, on oublie qu’on est habitué. Alors on perd son écorce et on se rappelle…» raconte l’un d’eux. Bientôt, le lecteur se sent si proche des personnages qu’il lui est presque possible de les toucher. Par le biais de dialogues, les portraits sont dressés, tandis que les mots prononcés, entre ce qu’ils sous-entendent et les non-dits qu’ils tentent de masquer, sont chargés d’émotion. C’est que «la voix vient des profondeurs du puits où pourrissent les choses. Ces choses petites, dociles, ces maisons vides qui se construisent entre le déjeuner et le travail.»


Mise en lumière

L’histoire, quant à elle, s’organise autour d’un clochard muet à qui Sophia, une jeune serveuse, et Frìas, un policier veuf, se confient. Ces derniers se retrouvent démunis lorsque l’homme est envoyé dans un hôpital psychiatrique. Commence alors leur recherche, la rencontre empreinte de malaise entre Sophia et Elena, doctoresse nouvellement arrivée dans la petite ville. Elena, sa vie nerveuse, son caractère anguleux et son vocabulaire rempli de douceur. Son monde, cependant, est ébranlé lorsqu’elle commence à travailler à l’hôpital. Là-bas, il semble que tous connaissent le récit de son enfance agitée. Une miette de passé qui leur a été racontée comme une légende par le directeur, pressé d’interpréter la guérison de la gamine perturbée d’alors en un miracle qu’il aurait lui-même orchestré.

Et, lentement, les éléments de la vie des personnages sont mis en lumière. A l’image de cette pièce du fond qu’évoque le titre. Une chambre encombrée d’objets hétéroclites, auréolés de mystère qu’Elena découvre dans son appartement et commence à explorer. De la même manière, l’auteure fait sortir ses personnages de l’ombre. Elle fait briller leurs histoires, les entoure de sa langue délicate et particulière, avant de les donner en cadeau à ses lecteurs. 




«La Pièce du fond» est le deuxième roman de l’Argentine Eugenia Almeida
Trad. de François Gaudry
Métailié, 200 p.









 

 

 

 

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